Une taxe sur les chiens pour responsabiliser les propriétaires ?

Une éventuelle proposition de loi concernant une taxe sur les chiens suscite de vifs débats et interrogations parmi les propriétaires et les professionnels du monde canin. Dans un contexte où de nombreuses communes peinent à gérer les nuisances et les abandons d’animaux, certains élus proposent l’instauration d’une taxe pour responsabiliser les propriétaires et soutenir les initiatives locales en matière de bien-être animal. Mais quelles sont les motivations de cette mesure, quels en seraient les avantages et inconvénients et pour qui?

Les raisons derrière la taxe sur les chiens

Les partisans de cette taxe avancent plusieurs arguments pour justifier son intérêt, en soulignant les points suivants :

Lutter contre l’abandon : la taxe pourrait décourager certains abandons, en rappelant qu’adopter un chien implique des responsabilités financières. Le nombre d’abandons reste préoccupant dans certaines régions, et cette mesure viserait à inciter les propriétaires à mieux réfléchir avant d’adopter un animal.

Soutenir les infrastructures locales : les fonds récoltés pourraient être utilisés pour améliorer les infrastructures pour chiens, comme les parcs canins, les installations de propreté, ainsi que pour financer les refuges et les associations locales qui œuvrent pour le bien-être animal.

Réduire les nuisances publiques : les plaintes pour nuisances sonores et les incivilités liées aux déjections canines continuent d’augmenter. Une taxe pourrait financer des actions de sensibilisation, ainsi que des aménagements spécifiques en ville.

Quels avantages pour la collectivité ?

L’objectif principal serait de responsabiliser les propriétaires tout en générant des ressources pour des initiatives publiques spécifiques :

Améliorer la propreté urbaine : les communes pourraient investir dans davantage de distributeurs de sacs et d’espaces de propreté dédiés aux chiens, rendant les villes plus propres et agréables pour tous.

Financer des programmes de sensibilisation : des campagnes pour encourager la stérilisation, des cours de civisme canin, et des interventions éducatives dans les écoles pourraient être soutenus.

Soutien aux refuges : une partie des fonds pourrait être allouée aux refuges, pour mieux gérer les abandons et améliorer les conditions d’accueil des animaux.

Les préoccupations des propriétaires de chiens

Si cette taxe pourrait apporter certains avantages collectifs, elle soulève aussi plusieurs objections, notamment :

Inégalités de revenus : de nombreux propriétaires s’inquiètent qu’une taxe supplémentaire puisse rendre la possession d’un chien plus difficile pour ceux qui disposent de revenus modestes, et pourrait dissuader l’adoption d’animaux dans les refuges.

Potentiel d’augmentation des abandons : ironiquement, la taxe pourrait augmenter le nombre d’abandons, en particulier chez les personnes qui ne pourraient plus assumer cette charge supplémentaire.

Justice de la mesure : certains estiment qu’il serait injuste de taxer tous les propriétaires de chiens, alors que la majorité se conforme aux règles de propreté et de civisme. Les personnes responsables pourraient ainsi se retrouver pénalisées par les comportements d’une minorité.

Exemples de mesures similaires à l’étranger

Certains pays européens, comme l’Allemagne, appliquent déjà une taxe sur les chiens, et leurs retours peuvent apporter un éclairage intéressant :

En Allemagne : la taxe sur les chiens (« Hundesteuer ») est appliquée par de nombreuses municipalités, avec des variations de tarifs en fonction des régions. Les fonds récoltés permettent de financer des services d’éducation et de propreté. Cependant, des ajustements spécifiques, comme des exemptions pour les chiens-guides ou les chiens de sauvetage, sont courants pour garantir l’équité.

Au Royaume-Uni : bien qu’il n’existe pas de taxe directe, des efforts sont faits pour responsabiliser les propriétaires, notamment avec l’obligation de micropucer tous les chiens et d’assurer une traçabilité en cas d’abandon.

Comment pourrait-elle être appliquée en France ?

Si une telle taxe venait à être instaurée en France, elle pourrait prendre plusieurs formes :

Un tarif modulé selon le type de chien : par exemple, des réductions pour les chiens adoptés en refuge ou pour les chiens de travail.

Des exemptions pour les foyers modestes : afin d’éviter une injustice sociale, la taxe pourrait être ajustée en fonction des revenus des propriétaires.

Des incitations pour les bons comportements : plutôt qu’une simple taxe, un modèle de bonus-malus pourrait être envisagé, avec des réductions pour les propriétaires participant à des programmes de civisme canin.

L’avenir de la taxe sur les chiens : responsabilisation ou obstacle ?

L’idée d’une taxe sur les chiens est un sujet délicat qui appelle des discussions nuancées. Si elle peut aider à financer des actions pour le bien-être animal et la propreté urbaine, elle pourrait aussi constituer une barrière pour de nombreux amoureux des animaux. Pour beaucoup d’éducateurs canins, vétérinaires et défenseurs du bien-être animal, la priorité reste d’assurer une adoption réfléchie et de promouvoir des comportements responsables.

En attendant, les débats continuent, et l’avenir de cette proposition dépendra des compromis que l’on saura établir entre le bien-être animal, l’intérêt public et la protection des droits des propriétaires.

Coralie Grandjean
Educatrice canin chez Educ et Coralie
Toulouse, Balma et alentours